mercredi 8 mars 2017

Femmes chinoises

La journée du 8 mars pour les droits des femmes a été lancée en URSS à partir de 1921, et a été relayée par l'ONU à partir de 1977. Il a fallu 56 ans pour que cette initiative à laquelle le communisme donnait tout son sens, soit reprise dans le monde entier.

Après la seconde guerre mondiale, tous les pays qui ont connu des révolutions communistes, ou qui se sont trouvés placés sous la coupe directe de l'URSS, ont adopté la journée du 8 mars. En Chine, elle célébrait la rupture introduite par le communisme dans les conditions de vie des femmes, face au confucianisme qui les régissait avant la révolution.

C'est ce qu'exprime le petit ouvrage dont je vous ai choisi quelques extraits, livre imprimé en Chine en 1973 à destination d'un public francophone.


Le confucianisme, qui s'est développé à partir du début du -5ème siècle, c'est-à-dire 3 siècles avant l'avènement de la Chine impériale unifiée, dans un contexte de déchéance progressive de la dynastie Zhou, était confronté au problème de l'instabilité sociale attachée à la défaillance du pouvoir politique, et il misait sur l'union sacrée de la culture et de la morale pour réguler la vie sociale dans son ensemble, politique comprise. Valorisant les fonctions représentatives pour mieux les charger d'une mission culturelle et morale, le confucianisme ne s'est intéressé qu'aux hommes, qui seuls peuvent représenter un groupe (famille, province, royaume). Le noyau dur de l'union de la culture et de la morale était la relation entre père et fils, modèle de la relation de gouverneur à administrés ou de prince à peuple. Point de mère ni de fille, mais une hiérarchie bien définie au sein de la famille, dont les trois premiers termes sont le père, le fils aîné, le frère cadet de l'aîné.

Dans l'effervescence philosophique qui caractérise cette période, en dépit des luttes entre écoles et des prises de position sciemment contradictoires, l'oubli du féminin semble faire consensus. Seul le taoïsme de Lao tseu fait entendre une voix faiblement discordante. Lao tseu érige en l'occurrence le féminin en emblème de l'oubli, de l'oubli de ce qui importe le plus à la culture chinoise : l'élan de la vie, le qi. En construisant de vastes royaumes, les hommes ont perdu leur souplesse (leur qi natif), ont rompu le lien qui les rattache à la Mère de toutes choses. Lao tseu n'a pour autant garde d'envisager sur cette base une réforme de la structure sociale et de redonner aux femmes une place dominante.

L'avènement de l'empire chinois n'a pas amélioré la condition des femmes. Le confucianisme s'est lentement imposé face à ses concurrents pour consolider la classe des lettrés, cette classe que le maoïsme s'est attaché, finalement sans grand succès, à combattre. La révolution communiste en Chine s'est en ce sens donné pour tâche de rétablir l'égalité des femmes et des hommes. L'ouvrage ci-dessous s'inscrit dans le cadre de la révolution culturelle, entreprise par Mao de 1966 à 1976 pour affermir le pouvoir de sa faction au sein du parti contre ses éléments libéraux. On y lit trois témoignages directs de femmes et plusieurs récits sur la vie de certaines femmes écrits par des écrivaines.








Une réflexion liminaire permet de mesurer l'opposition du maoïsme au confucianisme : avant la révolution, les femmes pensaient pouvoir changer la société en faisant évoluer les rapports de sexes au sein de la famille, et cela tout à fait dans l'esprit du confucianisme (les relations familiales étant le modèle de toutes les autres relations sociales), mais lors de la révolution elles ont pris conscience du fait qu'il fallait faire évoluer la société pour pouvoir changer les rapports de sexes au sein de la famille, ce qui n'est plus du tout confucianiste.

Je n'entends point débattre ici du communisme, de sa version chinoise et de la révolution culturelle qui, un temps, a violemment secoué la Chine, je retiens seulement deux choses :
  • dans nos sociétés non communistes, pour une femme, chercher en priorité à améliorer sa position dans son ménage est une tâche qui, sans être vaine, demande un effort constant indéfiniment répété, car ce ménage est éminemment sensible aux pressions sociales, qui convergent toutes vers l'inégalité des droits ; il est inévitable de prolonger cet effort dans le cadre de sa propre famille et de celle de sa compagne ou de son compagnon, dans le cadre de son travail, dans l'espace public, etc. ; de ce fait, l'engagement politique semble nécessaire pour cesser d'être seule à agir contre tous ;
  • dans nos sociétés, le 8 mars est bien une journée de lutte pour les droits des femmes, mais dans les sociétés communistes aujourd'hui disparues le 8 mars était un jour de fête, la célébration d'un acquis, celui de l'égalité des droits entre femmes et hommes.






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