dimanche 28 septembre 2025

Bible, premiers pas #1 Le serpent

 

Dans les textes bibliques que le christianisme a jugés signifiants pour sa doctrine et que la liturgie de la parole (*) se plaît à rapprocher, la figure du serpent apparaît principalement à trois reprises, sous trois aspects qui constituent une progression positive les uns par rapport aux autres. L’arbre lui est à chaque fois associé, en tant que tel ou sous forme de mât ou de croix.

(*) Partie de la messe catholique constituée de lectures tirées de la sainte Écriture.

Cette association n’est pas propre au monde hébraïque ; elle a produit en Grèce, au Ier millénaire avant J.-C., les symboles de la médecine : caducée d’Hermès (un bâton surmonté de deux ailes et où s’enroulent deux serpents) et bâton d’Asklépios (un bâton où s’enroule un serpent). Dès l’époque minoenne, au – XVIe siècle, on racontait que la Grande Déesse, Ditkynna (**), avait pour demeure le jardin des Hespérides, où poussait l’Arbre de Vie dont les fruits conféraient une jeunesse perpétuelle à qui était autorisé à en manger. Un serpent en gardait l’accès, à la fois délégataire de la déesse, gardien de ses « pouvoirs », et menace pour les humains qui cherchaient à en jouir sans son aval. Le parallélisme structural avec la Genèse est trop évident pour que les deux traditions ne relèvent pas d’une seule et unique culture, où serpent et arbre, associés l’un à l’autre, sont riches de signification au regard de la relation fondamentale entre l’humain et le divin.

(**) The Rod and the Serpent : History’s Ultimate Healing Symbol, Stavros A. Antoniou, George A. Antoniou, Robert Learney, Frank A. Granderath, Athanasios I. Antoniou, Société Internationale de Chirurgie, 2010.

L’intérêt de la Bible est de nous présenter un symbolisme du serpent et de l’arbre-bâton à la fois multiple dans sa signification, diachronique dans sa construction, et intégré à l’unité d’un récit prophétique.

A) La Genèse 3, 1-15

Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le Seigneur Dieu avait faits. Il dit à la femme : « Alors, Dieu vous a vraiment dit : “Vous ne mangerez d’aucun arbre du jardin” ? » La femme répondit au serpent : « Nous mangeons les fruits des arbres du jardin. Mais, pour le fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : “Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, sinon vous mourrez.” » Le serpent dit à la femme : « Pas du tout ! Vous ne mourrez pas ! Mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » La femme s’aperçut que le fruit de l’arbre devait être savoureux, qu’il était agréable à regarder et qu’il était désirable, cet arbre, puisqu’il donnait l’intelligence. Elle prit de son fruit, et en mangea. Elle en donna aussi à son mari, et il en mangea. Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils se rendirent compte qu’ils étaient nus. Ils attachèrent les unes aux autres des feuilles de figuier, et ils s’en firent des pagnes. Ils entendirent la voix du Seigneur Dieu qui se promenait dans le jardin à la brise du jour. L’homme et sa femme allèrent se cacher aux regards du Seigneur Dieu parmi les arbres du jardin. Le Seigneur Dieu appela l’homme et lui dit : « Où es-tu donc ? » Il répondit : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur parce que je suis nu, et je me suis caché. » Le Seigneur reprit : « Qui donc t’a dit que tu étais nu ? Aurais-tu mangé de l’arbre dont je t’avais interdit de manger ? » L’homme répondit : « La femme que tu m’as donnée, c’est elle qui m’a donné du fruit de l’arbre, et j’en ai mangé. » Le Seigneur Dieu dit à la femme : « Qu’as-tu fait là ? » La femme répondit : « Le serpent m’a trompée, et j’ai mangé. » Alors le Seigneur Dieu dit au serpent : « Parce que tu as fait cela, tu seras maudit parmi tous les animaux et toutes les bêtes des champs. Tu ramperas sur le ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie. Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance : celle-ci te meurtrira la tête, et toi, tu lui meurtriras le talon. »

B) Le Livre des Nombres 21, 4b-9

En ces jours-là, en chemin à travers le désert, le peuple perdit courage. Il récrimina contre Dieu et contre Moïse : « Pourquoi nous avoir fait monter d’Égypte ? Était-ce pour nous faire mourir dans le désert, où il n’y a ni pain ni eau ? Nous sommes dégoûtés de cette nourriture misérable ! » Alors le Seigneur envoya contre le peuple des serpents à la morsure brûlante, et beaucoup en moururent dans le peuple d’Israël. Le peuple vint vers Moïse et dit : « Nous avons péché, en récriminant contre le Seigneur et contre toi. Intercède auprès du Seigneur pour qu’il éloigne de nous les serpents. » Moïse intercéda pour le peuple, et le Seigneur dit à Moïse : « Fais-toi un serpent brûlant, et dresse-le au sommet d’un mât : tous ceux qui auront été mordus, qu’ils le regardent, alors ils vivront ! » Moïse fit un serpent de bronze et le dressa au sommet du mât. Quand un homme était mordu par un serpent, et qu’il regardait vers le serpent de bronze, il restait en vie !

C) L’Évangile de saint Jean 3, 13-17

En ce temps-là, Jésus disait à Nicodème : « Nul n’est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme [le Verbe devenu chair]. De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »


1) Entre étiologie et prophétie

« Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance : celle-ci te meurtrira la tête, et toi, tu lui meurtriras le talon. »

Cette sentence rendue par le Dieu de la Genèse contre le serpent n’énonce pas une évidence comme on pourrait le croire : le serpent, animal des champs, n’est pas l’ennemi de l’agriculteur, dont il est même l’auxiliaire en tant que prédateur des animaux mangeurs de grains ; il n’est pas non plus l’ennemi de l’éleveur. C’est dans le désert, où ses attaques contre ceux qui s’y risquent sont aussi imprévisibles que mortelles, qu’il constitue un danger. S’il s’agit d’un mythe étiologique, comme on l’admet généralement, celui-ci explique moins l’origine d’une relation ordinaire entre humains et serpents, que d’un rapport sacré très particulier, où le serpent représente plus que ce qu’il est dans la vie quotidienne.

Dans la perspective chrétienne, la sentence divine contre le serpent est clairement prophétique. La descendance d’Ève, en le fils charnel de Marie, meurtrira sa tête, et d’abord dans le désert où, devenu Satan, il est venimeux de la tentation du péché contre Dieu (cf. Matthieu 4, 1-11). Le « non » que lui oppose le Christ est cette meurtrissure qui l’atteint. Et selon saint Jean, si le Christ a su dire « non », c’est qu’il est ce serpent de bronze qui annule les effets du venin instillé par les serpents du désert sinaïque. Cela fait de l’exode ce moment particulier où la descendance d’Ève, rebelle à Dieu, s’est trouvée effectivement meurtrie au talon par le serpent, d’une meurtrissure que seul le Christ peut véritablement guérir, dont le serpent de bronze n’est que l’annonce. Dans cette perspective, les trois citations relevées forment en quelque sorte un triangle, dont le sommet est l’expression d’une prophétie dont la réalisation se fait en deux temps, l’exode et la rédemption. Le serpent se trouve ainsi au centre de l’eschatologie chrétienne, ce qui n’est pas, comme nous le verrons, sans poser des problèmes de doctrine.


2) La figure combinée du serpent et de l’arbre : interdit et pouvoirs

La comparaison entre le jardin des Hespérides minoen et le paradis hébraïque nous fournit les invariants culturels de la question au – IIe millénaire. D’un côté, un arbre de Vie, de l’autre, un arbre de la connaissance du Bien et du Mal distinct de l’arbre de Vie. D’un côté, un serpent qui empêche l’accès à l’arbre conformément à l’interdit prononcé par la Grande Déesse, de l’autre, un serpent qui invite à y accéder en transgressant l’interdit prononcé par Dieu. Au-delà de ces oppositions structurales subsiste le lien entre le serpent et l’accès à un pouvoir divin, représenté par l’arbre (équivalent du sceptre qui concentre tous les pouvoirs divins), dont l’usage par l’être humain est proscrit par le divin. Dans les deux cas, la dangerosité du serpent à l’égard de celui-là est à la hauteur de celle de l’interdit qui entoure le pouvoir divin, c’est-à-dire que le serpent est le pouvoir lié à l’interdit lui-même : pouvoir d’opposition dans un cas, pouvoir de tentation dans l’autre. D’autres variantes culturelles sont possibles, comme le pouvoir d’intercession, qui répare les effets (péché) du pouvoir de tentation, ou bien le pouvoir de neutralisation, qui annule les effets (morsure du serpent) du pouvoir d’opposition, ces différents pouvoirs pouvant encore se combiner entre eux. Nous les retrouvons tous, en l’occurrence, dans les trois textes cités, combinés de différentes manières. La richesse du jeu de pouvoir que recèle le rapport du serpent à l’arbre est telle que le Temple juif puis l’Église chrétienne s’en sont inquiétés, à la fin du – VIIIe siècle pour l’un et dès le IIe siècle pour l’autre, comme nous le verrons.


3) Péché et salut

Au fil de nos trois textes, le serpent passe progressivement de l’instrument de la damnation des hommes à celui de leur salut, salut d’abord physique – les hommes guérissent de la morsure du serpent et ne meurent pas – puis spirituel : les hommes, rédimés, auront la vie éternelle. Un commentaire du Livre de la Sagesse parle ainsi du serpent de bronze comme d’un « signe de salut » :

C’est en guise d’avertissement qu’ils avaient été alarmés pour un peu de temps, mais ils possédaient un signe de salut, qui leur rappelait le commandement de ta Loi. Celui qui se tournait vers ce signe était sauvé, non pas à cause de ce qu’il regardait, mais par toi, le Sauveur de tous. (16, 6-7).

Cette progression marque d’abord une pause avec, dans un premier temps, une figure de serpent entièrement négative : dans la Genèse, le serpent apporte la mort physique (la condition mortelle de l’humanité) et spirituelle (le péché) ; dans les Nombres, la morsure des serpents entraîne la mort physique, tout en rappelant qu’elle est le fruit du péché (de la mort spirituelle). Le renversement de valeur se fait juste après, avec la fabrication et l’érection du « serpent brûlant », approfondi et confirmé par le parallèle johannique fondé sur la notion d’élévation et tendant à identifier le Christ à ce reptile : le Christ est élevé au Ciel lors de l’Ascension, mais il l’est surtout sur la Croix, le bois du « mât » renvoyant à celui de cet appareil d’infamie devenu instrument de gloire. Détail qui a son importance : élevé sur le bois de la croix, le serpent/Christ s’affranchit de la malédiction qui le frappait pour avoir séduit Ève et qui le condamnait à ramper sur le ventre et à manger de la poussière tous les jours de sa vie.

Ce retournement symbolique contient toute la doctrine chrétienne que la célébration catholique de la Vigile pascale Exultet a su merveilleusement condenser dans l’expression « felix culpa », la faute adamique heureuse, car féconde et grosse de celui qui la rachètera en la personne du Christ. L’acte de rachat où s’exprime l’amour incommensurable de Dieu pour sa créature (Car Dieu a tant aimé le monde…) dépasse incommensurablement la faute et c’est dans cette distance de la faute au rachat que s’inscrit la nature heureuse de celle-là. Saint Ambroise, suivi en cela par saint Augustin, est allé encore plus loin, en soutenant que la faute d’Adam a plus apporté au monde que s’il était resté innocent. Cette pensée annonce toutes les théodicées qui tentent de résoudre le problème de l’existence du Mal dans un monde créé par un Dieu omnipotent et omnibénévolent : la nature peccable de l’homme se justifie par la possibilité quelle offre à Dieu de pardonner et de manifester sa bonté. Encore une fois l’Exultet traduit parfaitement cette idée : Nihil enim nobis nasci prófuit, nisi rédimi profuísset / « Car en vain aurions-nous vu le jour, si cela ne nous avait servi à être rachetés », que l’on peut gloser ainsi : Adam n’a été créé que pour pêcher et être racheté par le Christ.


4) Une figure problématique

L’hérésie ophite (du grec ὄφιανοι > ὄφις : « serpent »), qui voit le serpent comme un facteur positif du salut, n’a donc au fond rien de contraire aux textes sacrés. Par contre, c’est sa redistribution des figures du Bien et du Mal qui a pu entraîner sa condamnation, au IIe siècle, par l’Église chrétienne : en effet, le Dieu créateur de la Genèse, appelé « Démiurge » par les Ophites, devient un être démoniaque, auteur d’une Création volontairement corrompue et mauvaise, jaloux de l’homme qu’il veut empêcher d’accéder à la connaissance ; le rôle du Dieu bon, sauveur de l’humanité, revient au Serpent, identifié au Christ. S’opposent ici le serpent comme pouvoir d’opposition et le serpent comme pouvoir de neutralisation doublé du pouvoir d’intercession, exactement comme dans les Nombres. Les Ophites, en assimilant l’un au Mal et l’autre au Bien, sont obligés de postuler un Dieu caché transcendant, dont le Créateur et le Christ ne sont au fond que deux pouvoirs complémentaires. Leur condamnation pour hérésie par l’Église vient sans doute de leur conception d’une Trinité source du mal autant que du bien, d’une Trinité indifférente d’un côté (le Dieu caché) et en conflit avec elle-même de l’autre (le Démiurge et le Christ).

La figure du serpent dans les Nombres interroge également en ce qu’elle semble introduire une rupture complète avec la doctrine religieuse juive. Car cet étrange simulacre de bronze que Dieu enjoint de fabriquer, malgré l’interdit de représentation formulé en Exode 20, 4 (Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre), a quelque chose du veau d’or détruit par Moïse en Exode 32, 19, donc d’une idole. C’est ce qui justifie d’ailleurs sa destruction dans un passage du Livre des Rois qui offre un véritable décalque de ce célèbre épisode, Ézéchias, roi de Juda à la fin du VIIIe siècle avant notre ère, exécutant zélé de l’idéal religieux du Deutéronome de centralisation et de purification cultuelles, y apparaissant comme un nouveau Moïse triomphant de l’idolâtrie des « fils d’Israël » :

C’est lui [Ézéchias] qui supprima les lieux sacrés, brisa les stèles, coupa le Poteau sacré et mit en pièces le serpent de bronze que Moïse avait fabriqué ; car jusqu’à ces jours-là les fils d’Israël brûlaient de l’encens devant lui ; on l’appelait Nehoushtane (2 Rois 18, 4).

Ce rapprochement avec le veau d’or n’est pourtant pas si évident qu’il paraît à première vue : d’une part, Dieu lui-même a ordonné la fabrication de cette figure qui est sa présence rendue perceptible à l’œil humain, car, dans l’Ancien Testament, l’on ne saurait voir Dieu sans mourir (« Tu ne peux voir ma Face, car l’homme ne peut me voir et vivre. » Exode 33, 20). C’est ce qu’exprime le terme hébreu de « Kabod » : la Kabod est le Très-Haut qui manifeste sa puissance et se révèle à son peuple tout en demeurant inaccessible. D’autre part, le serpent est fait de bronze et non d’or, attribut du seul Yahvé, symbole de pureté et de sacralité (cf. les recommandations en Exode 26-27 concernant les matériaux de la Tente de la Rencontre et de son mobilier : plus l’on approche du Saint des Saints et plus l’or est employé, plus l’on s’en éloigne et plus l’on recourt au bronze) : le serpent n’est pas Dieu, il est un Dieu dégradé, un simple délégataire de sa puissance salvatrice, qui fonctionne également comme un « signe » (cf. Livre de la Sagesse), un rappel, un mémorial de ce qui attend ceux qui transgressent ses lois. Enfin, il n’est rien moins que destiné au culte, comme dans le texte de 2 Rois 18, 4, où les fidèles ont à ce point oublié sa fonction thérapeutique initiale qu’ils vont jusqu’à célébrer pour lui des cérémonies religieuses.

Pour prolonger la réflexion sur la figure du serpent dans la Bible, intéressons-nous à un curieux passage du Livre de Samuel :

Ils demandèrent : « Quelle offrande de réparation faut-il y joindre ? » Ils répondirent : « D’après le nombre des princes Philistins : cinq tumeurs en or et cinq rats en or, car c’est un même fléau qui vous a tous atteints, vous et vos princes. Vous ferez donc des images de vos tumeurs et des images des rats qui dévastent votre pays, et vous rendrez gloire au Dieu d’Israël. Peut-être sa main se fera-t-elle plus légère sur vous, sur vos dieux et sur votre pays. » (Samuel 6, 4-5)

Ce court passage réussit l’exploit de promouvoir une double transgression des lois religieuses juives : de l’interdit de la représentation et de celui des rites magiques (proscrits dès le Livre du Deutéronome 18, 9-12), si tant est que la confection des tumeurs et des rats d’or ressortisse bien d’une pratique prophylactique d’origine mésopotamienne. La chose peut néanmoins s’expliquer par le fait que les Philistins, qui ne sont pas juifs, ne peuvent véritablement pécher et transgresser des lois auxquelles ils ne sont pas soumis. Ils ne sont au fond, dans la Bible, que des instruments dont Dieu dispose, soit pour favoriser/rétribuer les Juifs (cf. la promesse faite au peuple élu d’occuper le territoire philistin), soit pour les punir (l’effet de la promesse est alors suspendu). Ce n’est donc pas le serpent qui doit servir à châtier les Philistins pour avoir placé l’arche d’alliance dans le temple de leur idole Dagone, mais des tumeurs (euphémisme désignant des hémorroïdes) et des rats qui dévorent leur grain (justement faute de serpent). La reconnaissance de leur faute passe par le renvoi de l’arche, accompagné par les offrandes en or à l’image de leurs maux. Il s’agit d’offrandes-signes pour réparer une faute et non d’un signe réorienté pour neutraliser l’effet d’un péché mortel comme dans les Nombres. Aussi l’or est-il recommandé là où le bronze s’imposait.


5) Parce qu’il faut bien conclure

La lecture des textes bibliques est une expérience dérangeante : l’impression d’étrangeté qui en découle est en grande partie alimentée par les incohérences et les contradictions qui s’y trouvent en nombre, et celles que nous avons relevées n’en sont qu’un faible exemple. Le petit travail d’analyse réalisé ici avait pour but de les dépasser pour retrouver la cohérence des textes et de la pensée qui les sous-tend. Néanmoins un tel travail, certes satisfaisant intellectuellement, va sans doute à rebours de ce qu’est la Bible, qui, loin de former une production harmonieuse et homogène, témoigne au contraire du mouvement qui a fait évoluer la conception du divin et de son culte pour aboutir au monothéisme et au judaïsme tels que nous les connaissons, et conserve donc à ce titre des éléments qui ressortissent d’un stade antérieur de la religion, où les idoles et la pluralité du divin avaient encore toute leur place.

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